Indemnisation du candidat illégalement évincé et offre irrégulière
Indemnisation du candidat illégalement évincé et offre irrégulière – Conseil d’État, 18 décembre 2020, société Architecture Studio, n°429768
Dans le cadre d’une consultation en vue d’un marché de conception réalisation portant sur la construction d’un nouveau bâtiment hospitalier, le Conseil d’État est venu préciser l’appréciation des chances de remporter le marché d’un candidat dont l’offre n’avait pas l’objet d’une régularisation.
L’article R. 2152-2 du code de la commande publique autorise l’acheteur, dans le cadre d’une procédure formalisée ou d’une procédure adaptée sans négociation, à régulariser les offres irrégulières qui ne sont pas anormalement basses. Cette faculté relève du pouvoir discrétionnaire de l’acheteur dans le respect des grands principes de la commande publique dont le principe d’égalité de traitement.
L’attribution du contrat avait fait l’objet, par le candidat évincé classé deuxième, d’un recours en contestation de validité du contrat. Il demandait l’annulation du contrat et l’indemnisation de ses préjudices.
Le Conseil d’État, dans un premier temps, rappelle sa jurisprudence de principe quant à l’indemnisation d’un candidat irrégulièrement évincé, à savoir :
« Lorsqu’un candidat à l’attribution d’un contrat public demande la réparation du préjudice né de son éviction irrégulière de ce contrat et qu’il existe un lien direct de causalité entre la faute résultant de l’irrégularité et les préjudices invoqués par le requérant à cause de son éviction, il appartient au juge de vérifier si le candidat était ou non dépourvu de toute chance de remporter le contrat. En l’absence de toute chance, il n’a droit à aucune indemnité. Dans le cas contraire, il a droit en principe au remboursement des frais qu’il a engagés pour présenter son offre. Il convient en outre de rechercher si le candidat irrégulièrement évincé avait des chances sérieuses d’emporter le contrat conclu avec un autre candidat. Si tel est le cas, il a droit à être indemnisé de son manque à gagner, qui inclut nécessairement, puisqu’ils ont été intégrés dans ses charges, les frais de présentation de l’offre. En revanche, le candidat ne peut prétendre à une indemnisation de ce manque à gagner si la personne publique renonce à conclure le contrat pour un motif d’intérêt général. »
Dans un second temps, il applique sa jurisprudence au cas d’espèce. En l’occurrence, l’offre du candidat évincé était irrégulière, toute comme celle de l’attributaire.
Pour le Conseil d’État, la faculté dont dispose d’acheteur de régulariser les offres, dans les circonstances précisées précédemment, ne permet pas de regarder le soumissionnaire comme disposant de chances de remporter le contrat.
En tout état de cause, l’offre du candidat irrégulièrement évincé n’était pas conforme à des éléments essentiels du « programme fonctionnel et spatial » dont le respect était exigé par le règlement de la consultation. L’offre n’était, dès lors, pas régularisable, dès lors que sa régularisation aurait entrainé sa modification substantielle, ce qui est strictement interdit par le code. En définitive, la société requérante était dépourvue de toute chance d’obtenir le contrat et n’avait ainsi droit à aucune indemnisation.